Audace ou enlisement : la liberté locale au coeur du 100e Congrès des Maires de France

Discours d'André Laignel, prononcé à la tribune pour l'ouverture du Congrès des Maires de France mardi 22 novembre 2017.

 

"Monsieur le Président,

Mes chers collègues,

Ouvrir ce débat d'orientation est, bien entendu, un honneur, un honneur d'autant plus important que nous sommes dans un congrès exceptionnel, c'est le 100ème, mais surtout avec le sentiment des 99 congrès qui nous ont précédés, des femmes et des hommes qui, depuis 110 ans – puisque vous savez qu'il y a 100 congrès, mais 110 ans que l'Association des maires de France a été créée, en 1907 – ont porté l'idée de liberté locale, de décentralisation.

L'histoire est ainsi faite que parfois elle bégaie. Les deux thèmes à l'ordre du jour du Congrès de 1907, c'était, d'une part, la suppression d'une taxe locale – je pense que cela vous parle un peu. À l'époque, c'était l'octroi. Eh oui ! Et l'autre sujet, c'était la recentralisation voulue par l'État.

Tels étaient les deux sujets de ce Congrès de 1907. Avouez que l'histoire a parfois des raccourcis et je pense que l'on pourrait organiser mon propos à cet instant autour des deux mêmes thématiques et, d'ailleurs, c'est en grande partie ce que je vais faire.

C'est aussi un congrès exceptionnel par l'importance de l'enjeu.

L'importance de l'enjeu, me semble-t-il, c'est de savoir si nous acceptons l'enlisement de l'idée de décentralisation ou, au contraire, si nous avons envie d'audace pour sa relance.

L'audace ou l'enlisement, c'est ce qui me semble être au cœur des débats que nous allons avoir dans les deux jours qui sont devant nous.

Je vais en quelques mots faire la météo des maires.

Un été calamiteux, et pourtant, il avait plutôt bien commencé avec l'annonce de la réunion de la Conférence nationale des territoires. C'était une demande de longue date que d'avoir un lieu, un lieu de dialogue, un lieu de négociations, un lieu de transparence et donc, lorsqu'on nous a annoncé la Conférence nationale des territoires, nous avons approuvé. Approuvé clairement.

Malheureusement, dès sa réunion, nous apprenons en cours de séance que la demande qui nous est faite de réduction de nos dépenses n’est plus de 10 milliards, ce qui n'avait déjà pas notre agrément, mais de 13 milliards. Et j'ai moi-même, lors de cette CNT, posé la question au Premier ministre en lui disant « mais, Monsieur le Premier ministre, comment se fait-il qu'en 48 heures, fin de semaine c’était 10 milliards, nous sommes lundi, c’est 13 milliards. Pouvez-vous nous expliquer cette évolution ? ». Nous n'avons jamais eu d'explication claire sur ce sujet.

Qui plus est, trois jours après on nous annonçait la suppression de 305 millions de crédits. On pouvait en débattre, mais ce qui nous a profondément choqué, c'est que nous avons eu toute une journée de Conférence nationale des territoires et que pas un seul instant on ne nous a informés de ce qui serait mis en œuvre.

Quelques jours plus tard, c'était l'annonce de la suppression de dizaines de milliers d'emplois aidés.

Où est le dialogue, où est la transparence ? C'est la question que nous avons été conduits à nous poser collectivement et qui a entraîné, me semble-t-il, la défiance que beaucoup d'entre nous ressentent aujourd'hui par rapport aux propos qui sont tenus à l'égard des communes de France.

Et après un été calamiteux, je dirai que nous avons eu droit à une avalanche d'automne. L'avalanche, c'est une loi de finances, d'abord, en trompe-l'œil.

Pourquoi en trompe-l'œil ?

Tout simplement parce que c'est vrai qu'il y a un gel de la DGF, donc il faut en donner acte. Mais contrairement à ce qui a été dit à de nombreuses reprises par le gouvernement, et d'ailleurs répété tout à l'heure par le Premier ministre, il n'y a pas une stabilité de nos crédits ni même de nos dotations. J'ai fait un travail de bénédictin – cela me va très bien – je suis arrivé quasiment à 2,5 milliards de suppression de crédits qui auraient dû aller sur nos territoires. 2,5 milliards d’euros.

Cela concerne, bien entendu, les Régions, par exemple, 450 millions. C'est d'ailleurs ce qui a conduit les Régions à claquer la porte de la Conférence nationale des territoires. C'est aussi la division par deux du fonds d'urgence pour les Départements. C'est aussi – et là je suis désolé de contredire le Premier ministre, mais j'avais écrit mes propos avant de savoir ce qu’il dirait – la baisse de la dotation de soutien à l'investissement local, -153 millions.

C'est -350 millions sur les territoires à énergie positive, c'est le chiffre qui a été donné, d'ailleurs, par le ministre lui-même. C'est moins… Bon, je vais arrêter là, j'en ai pour 2,5 milliards de baisse et donc dire qu'il y a un maintien des moyens des collectivités territoriales n'est pas la réalité vécue.

C'est ensuite, bien sûr, la baisse de 13 milliards qui a été longuement évoquée.

C'est vrai que c'est une baisse de l'évolution – ce qui n'est d'ailleurs pas juste puisque si vous regardez le jaune budgétaire, pour le bloc communal, c'est 1,1 % d'évolution qui est prévu. Alors, est-ce que ce sera modifié ? Je n'en sais rien, mais en tout cas, à l'aune des textes existants aujourd'hui et en débat devant le Parlement, c'est 1,1 %. Ce serait 1,4 % pour les départements et 1,2 % pour les régions.

Alors, 1,1 %, mais, mes chers collègues, dès l'instant où nous aurions une inflation de 1,2 %, cela veut dire que c'est déjà une baisse en euros constants. Et comme les inflations annoncées, toujours dans la loi de programmation, vont souvent bien au-delà, que nous savons les uns et les autres que les dépenses des collectivités territoriales, ce n'est pas le panier de la ménagère, c'est le panier du maire – et d'ailleurs nous avons sorti un document, qui est dans ce congrès, sur ce qu'est le panier du maire – et nous constatons que systématiquement depuis plus de dix ans, l'inflation que subissent nos collectivités territoriales est supérieure à l'inflation commune qui concerne les ménages.

Et donc, c'est bien une baisse. Mais surtout, on nous dit « rassurez-vous, c'est un contrat ». Alors, je ne sais plus très bien combien seront conduits à contracter. Est-ce que c'est 319 comme on nous le disait ? Le Premier ministre évoquait éventuellement 600. Mais surtout, ce qui pose question, c'est la nature du contrat.

Qu'est-ce que c'est qu'un contrat où l’on nous fixe à l'avance les charges qui nous seraient imposées, sans mettre en regard aucune contrepartie concrète au moment où je m'exprime ?

Qu'est-ce que c'est qu'un contrat qu’en définitive on assortit de menaces pour l'avenir puisque, si ce n'était pas respecté, il y aurait immédiatement des réfactions qui seraient faites sur les budgets communaux ?

Vous savez, il y a une définition simple en droit français : quand toutes les charges sont pour un seul partenaire et les avantages pour l'autre, cela s'appelle en droit français un contrat léonin, et un contrat léonin en droit français, c'est nul de plein droit.

C'est la mise en place d'un ratio d'endettement. Ah ! Décidément, la technocratie n'est jamais avare d’initiative ! Mais que veut dire un ratio d’endettement, alors que les communes, leurs intercommunalités sont modestement endettées ? Nous avions à midi une rencontre avec la presse financière sur ce sujet. La moyenne d'années de remboursement, c'est 4,5 années. Nous ne sommes pas endettés, ou si peu, puisque la dette du bloc communal représente en gros 5 % de la dette publique dans notre pays. L'ensemble des collectivités territoriales, c'est moins de 10 % alors que, je le rappelle, nous réalisons 70 % des investissements publics dans notre pays.

Qu'est-ce que c'est que ce nouveau ratio si ce n'est la volonté de pointer du doigt ces élus locaux qui seraient par nature dépensiers et qui créeraient de la dette alors que nous ne pesons pas dans ce domaine ?

Vous vous doutez bien que dans mon énumération… On est aujourd'hui dans les inventaires. Le Premier ministre nous en a fait un long, je vous promets qu’il sera un tout petit peu plus court en ce qui me concerne, mais je suis bien obligé d'aborder la taxe d'habitation, et puis tout le monde n'est pas Prévert.

Oui, oui, vous pouvez rire !

La taxe habitation est injuste. Je crois que nous pouvons partager avec le gouvernement, avec le Président, ce sentiment. Mais quand une taxe est injuste, il y a deux solutions. Ou on essaye de la corriger pour la rendre juste, et c'est faisable, ou on la supprime, mais alors on la remplace par un autre impôt, et un autre impôt qui, bien entendu, garde le lien entre le citoyen et la collectivité. Cela, c’est essentiel parce que la réforme telle qu'elle nous est proposée aujourd'hui, a pour moi des inconvénients majeurs.

D'abord, c'est ce lien rompu. Si, demain, dans nos communes, nos concitoyens peuvent penser que tout est gratuit et donc, quelque part, que tout leur est dû, pensez-vous que ce soit véritablement positif pour la démocratie locale ? À l'évidence, certainement pas.

À l'évidence, c'est une erreur grave. À l’évidence, c'est la citoyenneté qui est mise en cause.

On nous dit « c'est pour qu'il y ait plus d'égalité et plus de justice ». Mais je veux dire, quelle justice, alors qu'il y aura plus de 7 000 communes, vous m’entendez bien, plus de 7 000 communes qui auront au maximum cinq contribuables ? Il y en a même qui n’en auront plus du tout, quelques dizaines. Que veut dire un impôt sur lequel, bien évidemment, il n'y a plus aucune marge de manœuvre mais qui introduit des inégalités profondes ?

Ma petite ville d'Issoudun, ville ouvrière, revenu par habitant : 20 % de moins que la moyenne nationale, malheureusement. Je vais avoir quoi ? Allez, au maximum 5 % de la population qui va payer encore la taxe d’habitation. 5 %.

Neuilly – j'aurais pu prendre d'autres communes où la population est aisée – va avoir encore 75‑80 % de contribuables, et donc cela veut dire que si ces communes ont envie d'utiliser leur liberté fiscale, elles pourront faire porter l'effort sur 75 à 80 % des foyers.

Alors que moi, dans ma modeste commune, si je veux faire porter l'effort, il portera sur 5 % seulement des foyers ? Ce qui veut dire que ce n'est pas réalisable. C'est donc une nouvelle inégalité, une inégalité fondamentale qui, bien entendu, pénalise les communes qui ont des populations pauvres et favorise ou, en tout cas, défavorise extraordinairement moins les communes qui ont une population à revenus aisés.

Alors, oui, cela aggrave les inégalités.

Et puis j'aborderai deux autres sujets. J'avais prévu de les aborder, je ne veux pas donner le sentiment de répondre à un discours précédent. Ce sont les emplois aidés et les APL.

Je suis désolé, baisser de 120 000 le nombre d'emplois aidés, par rapport à la réalité de 2017 pour 2018, posera des problèmes aigus. J'entends bien, tout le monde devient prioritaire. Les DOM-TOM, et c'est normal, sont prioritaires dans l'attribution. Les banlieues aussi, c'est naturel. Le monde rural, à l'évidence. Comment pourrait-on le sacrifier ? Mais aussi tout le secteur sanitaire et social, heureusement. Mais aussi l'école.

Mais aussi… Mais attendez, il y a tellement de prioritaires et si peu de contrats aidés maintenus… Qui, véritablement pourra avoir une politique d'insertion à travers ce dispositif ?

Quand j'ai entendu le Président de la République dire que c'était du clientélisme, je lui ai dit – François BAROIN était avec moi quand nous l’avons rencontré tous les deux – « Monsieur le Président, j'ai été blessé personnellement que l'on puisse dire d'un maire, et je suis un maire parmi tous les autres, que c'est par clientélisme qu'il prend des emplois aidés, qu'il met en situation des femmes et des hommes, parfois jeunes, parfois moins jeunes, pour qu'ils aient la capacité à se réinsérer après avoir été éjectés du tourniquet de l'emploi ».

Et quand j'ai entendu le président de la République dire « mais qui veut des emplois aidés ? » dans un discours, eh bien, j'ai envie de lui dire « moi, Monsieur le Président de la République, quand j'avais 15 ans, étant sorti de l'école à 14ans, j'ai été au chômage pour une très longue durée. Et quand j'avais 15 ans j'aurais aimé qu'il y ait des emplois aidés. J'aurais aimé qu'on me tende la main. J'aurais aimé que l'on puisse me permettre de me réinsérer beaucoup plus facilement que je n'ai pu le faire par la suite ».

Oui, cela, c'est blessant et ce n'est pas acceptable.

Quant aux APL, moi, je veux bien qu'on fasse la tournée des banlieues pour dire que la rénovation urbaine est essentielle mais quand, dans le même temps, on affaiblit l'ensemble des offices publics, que 120 à 150 d’entre eux risqueraient d'être dans les difficultés, voire dans le rouge, que cela risque de mettre en panne la construction de logements, la rénovation de beaucoup de nos bâtiments, alors je me dis que ce n'est pas une politique qui, pour moi, est acceptable, quand cela touche à ceux qui ont besoin d'insertion, quand cela touche à ceux qui ont besoin de logement.

Ce n'est pas comme cela que je conçois l'action solidaire que nous menons, chacune et chacun, dans nos collectivités.

Alors, oui, j'avais parlé, il y a quelques années, du garrot financier. Ah, il faut garder ses fondamentaux ! Eh bien, le garrot financier, il continue à se resserrer, mais maintenant on y ajoute la camisole administrative. On ira présenter respectueusement à Monsieur le préfet notre budget pour qu'il puisse nous dire qu'après tout, il n'est pas si mauvais que cela, ou peut-être carrément détestable.

Mais je propose dans ce cas, si ce processus est maintenu, que l'on transforme le mot de « préfet » en mot de « censeur ». Au moins, nous saurons ce qui nous attend et à quoi nous pouvons répondre.

Alors, étouffement du fonctionnement, affaiblissement des ressources humaines, parce qu'on nous dit aussi qu'il faudrait supprimer 70 000 postes dans la fonction publique territoriale, rationnement de l'emprunt. Ce qui est dans la loi de programmation, mes chers collègues, vous ne l'avez sans doute pas tous lue, c'est que nous devrions dans les cinq ans baisser notre stock de dettes de 40 %.

Expliquez-moi, si l’on vous empêche d'augmenter vos dépenses de fonctionnement, qu'on vous demande de baisser votre stock de dettes de 40 % dans les cinq ans, comment nous pourrons participer à la relance de l'investissement dans notre pays ?

À cela s'ajoute évidemment l'assèchement fiscal que j'évoquais il y a quelques années.

En définitive, ce qui est en cause, c'est tout simplement la libre administration et même la République décentralisée.

Sur ces bases, et elles n'ont pas évolué à travers ce que j'ai entendu aujourd'hui, il est clair que je ne vois pas bien comment nous pourrions participer à une Conférence nationale des territoires alors que, d'ores et déjà, ce qui nous étouffe est acté, en espérant bien sûr que jeudi démente ce que mardi m’aura obligé à dire.

Et maintenant, deux mots me viennent à l'esprit, unité et combativité.

D'abord, l'unité. C'est ce qui a été dit par la commission électorale, il y a quelques instants, nous vous proposons un candidat à la présidence de l'Association des maires de France et c'est avec plaisir que je le fais.

Nous avons, mon cher François, depuis trois ans, travaillé ensemble. Nous l'avons fait en restant nous-mêmes. Tu es ce que tu es, je suis ce que je suis.

Mais cela n'interdit pas qu'ensemble, en permanence, avec nos amis du Bureau exécutif, avec l'ensemble du Bureau, du Comité directeur, nous ayons su répondre dans l'unité aux obstacles, aux difficultés, parfois aux drames lorsqu'il s'est agi de terrorisme, nous avons répondu présents ensemble, au nom de l'Association des maires de France, et j'espère que par votre vote, demain, avec nous, vous répondrez présents parce que l'unité, c'est bien entendu le viatique de l'Association des maires de France, sa force fondamentale, et nous avons besoin de cette force dans la période.

Unis aussi pour refuser les caricatures. J'en ai marre, et je suis sûr que beaucoup d'entre vous avec moi. Alors, on serait ceci, on serait cela, les communes ne serviraient plus à rien, il y en aurait beaucoup trop... J'entends cela en permanence. J'en ai marre !

« Archaïques », c'est le mot qui revient. Eh bien, je vais vous dire, oui, il y a des archaïques, mais ce n'est pas forcément ceux auxquels on pense.

Les archaïques, pour moi, ce sont ceux qui acceptent les déserts qui progressent, les liens qui se déchirent, le sentiment d'abandon qui se développe, la tutelle qui impose, revenant 35 ans arrière, au nom d'un nouveau monde qui n'est que le bégaiement de l'ancien.

Recentraliser, affaiblir les corps intermédiaires, éloigner le pouvoir du citoyen, c'est, me semble-t-il, le contraire des attentes des Français. Ils aspirent à plus de proximité, d'autonomie, de liberté. C'est cela, la vision d'avenir.

À cette vision d'un État qui se veut tout-puissant alors qu'il n'en a plus les moyens, nous devons opposer l'ambition raisonnable d'une vraie République décentralisée dont la commune est, par nature, la clé de voûte. Lieu de modernité, d'innovation, de création continue, de solidarité et de citoyenneté, elle porte les valeurs fondamentales de la démocratie vécue, de la laïcité au quotidien, du vivre ensemble.

Quand les inégalités se creusent, que les injustices territoriales se renforcent, oui vraiment, jamais la commune n’a été aussi nécessaire. Les citoyens ne s'y trompent pas, qui continuent à la plébisciter. Les maires et les élus municipaux ont toujours leur confiance. Ils sont, comme l'avait dit François MITTERRAND, à cette même tribune du Congrès des maires de France, le premier recours et le dernier espoir.

Les affaiblir, c'est affaiblir la France. C'est donc à un choix de société que nous sommes confrontés. Mais nous sommes aussi unis pour proposer. Cela a été rappelé par Philippe LAURENT, il y a quelques instants. Nous avons une charte que nous avons adoptée à l'unanimité, la Charte pour l'avenir des communes.  C'est sur ce socle que peut s'engager une négociation.

Que le Président se rassure, nous ne croyons pas au Père Noël. Il paraît que c'est l'une de ses grandes craintes. Mais nous ne croyons pas non plus à la flatterie. J'ai déjà eu l'occasion de le dire : on nous a trop souvent caressé l'encolure d'une main pendant que l'autre main nous faisait les poches.

Nous voulons des engagements clairs : respecter la libre administration, garantir les moyens, améliorer la péréquation, alléger les normes et les contraintes. C'est sur ces bases qu'un dialogue fructueux peut s'engager.

Mais sans avancée majeure, à mon sens, aucun pacte n'est possible. Ce serait une occasion ratée et nous serions conduits à considérer avec Tocqueville qu'il « est des résistances honnêtes et des rébellions légitimes ».

Résister, oui. Résister au vent mauvais de la technocratie arrogante et du dénigrement quotidien – « dépensiers », « inefficaces », « clientélistes », mais aussi « trop nombreux ». Eh bien, non. Les élus locaux ne sont pas trop nombreux. C'est une chance pour notre pays d'avoir 550 000 élus locaux dont 85 % sont totalement bénévoles, qui se consacrent à la chose publique, qui se consacrent à leurs concitoyens, et j'ajouterai, sans compter le million ou le million et demi de tous ceux qui ont rêvé de l’être et qui n'ont pas encore réussi.

Alors oui, c'est une richesse, et cette richesse, on n'a pas le droit de la mettre en cause.

Se rebeller, oui si nécessaire, en saisissant le Conseil constitutionnel pour entendre réaffirmer que la République reste décentralisée, que les services publics sont au cœur du patrimoine de notre pays, en mobilisant s'il le faut les élus et citoyens pour la défense des libertés locales et en se rappelant, comme l'a écrit Albert CAMUS, que la liberté n'est pas un cadeau qu'on reçoit d'un État ou d'un chef, mais un bien que l'on conquiert tous les jours par l'effort et l'union de tous.

Alors, dans l'union, faisons de ce 100ème Congrès celui de l'audace par la relance de la décentralisation, par l'ouverture de nouveaux espaces de liberté, par la confiance retrouvée.

Audace, confiance, liberté.

Autour de ce triptyque, faisons cause commune, mes chers amis, mes chers collègues pour, ensemble, réussir la France."